mercredi 13 avril 2011

Douloureux souvenirs

Clos Seconde Roncines

Une petite fille, les mains attachées, avance dans le désert. De temps en temps elle chute dans le sable. Elle se remet debout grâce à l’aide des autres esclaves. Comme elle, ils marchent, à bout de force, vers une cité qui n’est plus très loin désormais. En effet, les lueurs de la ville illuminent la nuit à l’horizon. Plus que quelques dunes à franchir.

Les esclaves et la jeune enfant âgée de neuf années arrivent devant Midane. Midane, une ville grouillante de démons et autres créatures aux origines lointaines. Un endroit terrifiant pour la plupart des gens, et encore plus pour la fillette. Elle sait que le pire l’attend ici, dans cette ville dont le nom signifie « arène » en draconique. Elle sait déjà que son corps, son cœur et même son âme seront souillés par ce lieu de perdition. Des balafres sanglantes seront tracées dans sa chaire et dans son humanité. Rien de son innocence ne survivra.

La jeune fille a onze ans désormais. Elle reprend son souffle avec peine. Un goût métallique dans la bouche elle regarde le corps sans vie qui gît à ses pieds. Un jeune garçon, à peine plus vieux qu’elle ; son voyage dans sur la rivière de l’existence s’est brusquement arrêté. La jeune fille relève la tête, ses yeux bleus se perdent dans la foule en liesse. Sa longue chevelure rouge flotte dans le vent chaud qui tourbillonne au centre de l’arène. Elle regarde le ciel. Le soleil l’aveugle mais elle devine la silhouette macabre des oiseaux de proie. Puis, tout d’un coup, elle hurle sa rage.

Elle hurle sa douleur. Du haut de ses douze ans elle tente de supporter la souffrance que lui infligent des hommes masqués. Ils tatouent un lion dans son dos. Un tatouage qui n’a rien de commun, rien d’anodin. Désormais elle sera la Lionne Rouge. Sa fureur contre le monde atteint son apogée. Elle crache sa haine envers les hommes, sa haine envers elle-même, brûlante et acérée comme la morsure de l’aiguille qui traverse sa peau.

Elle a presque 18 ans. Le souffle du désert a un parfum étrange et nouveau. « Plus qu’une dernière mission », lui avait dit son propriétaire, « et tu seras libre ». Elle ne comprend pas trop la signification de « liberté », mais du moment qu’elle sort de l’arène, le reste n’a que peu d’importance.

Des hommes en noir maltraitent la jeune femme pour faire ressortir sa rage. Ils l’obligent à prendre divers substance qui troublent ses sens. Puis ils lui montrent la tente d’une caravane. Elle doit tuer celui qui l’occupe. Ensuite elle goûtera à la fameuse liberté.

Le souffle du désert fouette mon visage …

Je me réveille. Je suis en sueur.

La nuit n’est pas encore terminée. Quelques exclamations joyeuses mais discrètes parviennent à mes oreilles. On dirait Sharyar. Je ne sais pas ce qu’elle bricole dehors à cette heure si tardive. Sûrement a-t-elle fait des trouvailles intéressantes. Je ne vois pas quoi car, à part les plantes bizarres qui poussent dans le coin, il n’y a rien.

Je me recouche à l’entrée de la tente, il fait trop chaud à l’intérieur. Le sommeil ne reviendra pas. Pas avant une autre nuit et une bonne bouteille pour évacuer ces douloureux souvenirs.

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